L’été 2025 est l’occasion de consolider vos CGV, « socle unique de la négociation commerciale » et d’utiliser pleinement les armes juridiques à votre disposition avant leur communication aux acheteurs, au plus tard avant le 1er décembre 2025.
Hormis la reconduction jusqu’au 15 avril 2028 de l’encadrement des promotions dans les grandes surfaces (34 % de leur valeur et à 25 % en volume), le dispositif légal applicable aux produits alimentaires n’a pas été modifié depuis les dernières négociations commerciales, permettant plus de sérénité aux fournisseurs pour rédiger leurs conditions générales de vente (CGV). La référence à ce document clé doit être un réflexe permanent, afin de documenter le déroulé de bonne foi des négociations : dès l’envoi des CGV (en LRAR) qui marque le départ de la négociation commerciale : s’agissant des produits alimentaires (Article L.443-8 du Code de commerce), le distributeur doit, dans le mois suivant la réception des CGV, motiver par écrit le refus de celles-ci, notifier les conditions qu’il souhaite soumettre à négociation ou les accepter en bloc. Il conviendra ensuite, constamment lors de la négociation, de se référer par écrit (dans les comptes rendus d’entretien par exemple) au contenu des CGV. Même après la signature de la convention unique (à laquelle sont annexées les CGV), il est encore possible de souligner l’écart entre les conditions d’achat non négociables du distributeur et les CGV, à travers la pratique de la lettre de réserve, qui met en avant les risques pesant sur l’acheteur, au titre du déséquilibre significatif. La rédaction des CGV n’est pas seulement l’affaire des juristes et doit être nourrie d’une réflexion stratégique associant les services commerciaux, marketing et logistique.
Mieux protéger la valorisation de MPA
Les fournisseurs de produits alimentaires choisissent dans leurs CGV plusieurs options de transparence tarifaire « sans que l’acheteur ne puisse interférer dans ce choix » (Article L.441-1-1 I du Code de commerce). Ceux qui font le choix de l’option n°3 savent déjà que la certification « amont » doit intervenir dans le mois de l’envoi des CGV. Autant donc saisir le tiers indépendant le plus tôt possible, pour accompagner la justification de l’augmentation du tarif sur une juste prise en compte de l’évolution de la matière première agricole (MPA) et tester les différentes hypothèses de certification avec lui. Les clauses de révision automatique et de renégociation devraient être préétablies dans les CGV, afin, pour le fournisseur, d’être en position de force et de meilleure pédagogie dans la négociation. Outre les indices retenus et les seuils et date de déclenchement, une formule et un exemple d’application de ces deux clauses rédigées dans l’article pertinent des CGV permettent de mieux défendre la proposition du vendeur.
Préparer la négociation de la convention logistique
Les CGV peuvent librement déterminer si la convention unique et la convention logistique doivent être négociées séparément ou conjointement. Une clause pourrait utilement définir l’appréciation de la marge d’erreur du fournisseur, ainsi que le champ d’application et le calcul du taux de service, selon les contraintes propres à l’entreprise et à la nature de ses produits (par exemple les différences de livraison entre des produits frais et des surgelés). Une clause pourrait aussi fixer le standard documentaire demandé par le fournisseur sur les preuves de son éventuel manquement logistique et sur la démonstration du préjudice subi par l’acheteur, nécessaire avant toute production d’un avis de pénalité logistique. Enfin, au titre de la proportionnalité au préjudice subi, le fournisseur pourrait également proposer, dans ses CGV, ce qu’il entend par « catégorie de produits » (pour le calcul du plafond de 2 % retenu à l’article L.441-17 du Code de commerce).
Par Philippe Jouvet, avocat spécialisé en distribution alimentaire (Cabinet Ginestié Paley-Vincent)
1 - Les CGV doivent être le fil directeur de vos négociations. Il convient de s’y référer constamment.
2 - Elles permettent de faire jouer pleinement le dispositif Egalim en assurant une sanctuarisation de la matière première agricole.
3 - Elles sont aussi le support de la négociation de votre convention logistique avec le distributeur.